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Chaque homme porte en lui la forme entière de l’humaine condition
Discours annuel de la Reine à la Chambre des Lords
Il n'y a pas de séparation de l’Église et de l’État en Angleterre puisque l’Église anglicane est Église d’État avec le Roi comme gouverneur suprême (Supreme Governor of the Church of England), dont la cérémonie du couronnement est elle-même religieuse, comme le monde entier a pu le voir le 6 mai 2023 pour le couronnement de Charles III sous les ordres de l’archevêque de Cantorbéry.
S’il y a une Église d’État en Angleterre qui est anglicane, il faut noter que l’Écosse a sa propre Église, the Kirk, qui est presbytérienne (calviniste) et non anglicane. L’Église d’Écosse n'est pas une Église d’État, mais une Église nationale. Il en est de même pour l’Église du Pays de Galles (anglicane par contre, comme l’Église d'Angleterre). Les trois pays de Grande-Bretagne se distinguent donc du point de vue ecclésial et religieux.
Il n'y a pas de séparation de l’Église et de l’État en Angleterre car le Premier Ministre nomme officiellement les évêques et archevêques d'Angleterre, en consultant l’archevêque de Cantorbéry, lui-même nommé par le Premier Ministre sur proposition de la « commission de nominations de la Couronne », avec ratification du Roi.
Ce qui ne serait pas concevable en France : toutes les séances du Parlement britannique commencent par des prières sous la surveillance de l'aumônier du président de la Chambre des communes et la Chambre des Lords réserve 26 sièges aux évêques, qu'on appelle les Lords Spiritual (les autres lords étant les Lords Temporal), ce qui favorise une représentation politique de l'anglicanisme à l'exclusion de toutes les autres religions.
La Première ministre britannique Theresa May rend visite à la communauté sikh de Walsall, dans le centre de l'Angleterre, le jour de Vaisakhi, la fête des moissons, en avril 2018.
Autre preuve du caractère irréfutablement non laïque de la Grande Bretagne : l’existence de tribunaux islamiques établis par deux institutions musulmanes,
le Muslim Arbitration Tribunal et l'Islamic Sharia Council, à l'occasion d'une loi de 1996 permettant de recourir à l’arbitrage pour résoudre certains conflits sans passer par le juge.
Ces instances sont essentiellement habilitées à résoudre des contentieux familiaux, en majorité des divorces, bien que leurs verdicts ne soient officiellement pas contraignants, il renforce de fait la pression de la communauté pour l’application des décisions.
S'il s’agit donc de « conseils » plus que de tribunaux à proprement parler, ils pénalisent avant tout les femmes car elles doivent, contrairement aux hommes, obtenir le consentement de chefs religieux pour pouvoir divorcer, notamment dans le cas de mauvais traitements de la part de leur mari.
Sans avocat ni assurance d'une égalité de traitement, les femmes se tournent vers ces conseils islamiques plutôt que vers les juridictions du pays car elles ne sont mariées bien souvent que religieusement, le mariage civil n’étant pas obligatoire comme en France. Les dérives misogynes des verdicts rendus par ces tribunaux ont été dénoncées à la Chambre des Lords par la baronne Caroline Cox (voir le reportage de France Télévisions).
Le modèle multiconfessionnel anglais se distingue encore du modèle français par le fait qu'il est parfaitement opposé à ce que quelque règlement que ce soit puisse interdire l’expression d’une religion dans aucun lieu public, notamment à l'école. De telle sorte que les state schools (écoles publiques) peuvent parfaitement être des faith schools (écoles confessionnelles), en plus des nombreuses écoles privées (independant schools) à caractère religieux, et que la prière collective à l'école est une obligation, sauf exception, du dispositif législatif anglais.
De ce fait, c'est le débat sur la religion à l'école qui ne cesse d'être relancé au sein de la société anglaise.
Le débat commence en 1983, lorsque la Chambre des Lords a donné raison à la famille d'un enfant sikh qui refusait de porter la casquette faisant partie de l'uniforme imposé par l'établissement, car il exigeait de pouvoir conserver son turban (affaire Mandla contre Dowell Lee).
L'interdiction de porter le turban a alors été assimilée à une discrimination raciale, les membres de la religion sikh constituant, selon le Race Relations Act de 1976, un « groupe ethnique » protégé (dix huit groupes ethniques sont officiellement reconnus en Angleterre, qui n'interdit pas, comme en France, les statistiques ethniques.)
Le débat sur le port du niqab est régulièrement relancé en Angleterre
En 2004 néanmoins, une jeune lycéenne d'origine pakistanaise, à l'inverse, a été exclue d'un lycée public de Luton parce qu'elle portait le jilbab (longue tunique noire à capuche qui couvre le corps des femmes à l'exception des mains et du visage, semblable au tchador iranien).
Après avoir obtenu la cassation du jugement, son cas avait été porté devant la Chambre des Lords, où la jeune fille avait notablement pour avocate l'épouse du Premier Ministre Tony Blair. La chambre a considéré cette fois que l'interdiction de cet habit ne relevait pas du Race Relations Act du fait que 79% des élèves du lycée de Luton étaient musulmans, et que le port du shalwar kameez (costume chemise-pantalon traditionnel pakistanais) y était autorisé.
De manière générale, le port du voile à l'école, y compris le voile intégral, relève désormais en Angleterre du choix de chaque établissement. Le hijab est autorisé dans environ 20% des établissements selon une enquête menée par le Times, avec un taux de 46% au sein des écoles primaires de Birmingham (deuxième ville la plus peuplée du pays).
Si la neutralité des agents de l’État ne pose pas question en Angleterre (une femme professeur ou une policière pouvant porter le voile), le débat sur l'interdiction du voile à l'école est néanmoins régulièrement relancé, notamment depuis le scandale du « Cheval de Troie » de 2014, qui avait révélé que la direction de certaines écoles de Birmingham avait été infiltrée par un Islam radical, avec appels à la prière dans l'enceinte de l'école, salles de prière et séparation des garçons et des filles (les cours d’éducation sexuelle affirmant que « les épouses sont obligées d’assouvir les besoins de leur mari selon la sharia »). L'origine du scandale par lettre anonyme avait fortement compliqué l'établissement des faits, mais l'affaire est devenue la référence obligée dans tout débat sur les limites du système multiculturel anglais.
Tribune du Courrier international, 8 mai 2014
Une du Time de 2008. Tony Blair, Premier Ministre de 1997 à 2007, a été lors de son mandat un ardent défenseur des écoles confessionnelles financées par l’État.
Après s’être converti au catholicisme en 2007, il lançait la Tony Blair Faith Foundation pour lutter contre les extrémismes religieux.
Il est enfin reproché à la confessionnalisation des écoles de permettre une discrimination sur des critères religieux à l’entrée d'écoles subventionnées par l’État (34% des écoles publiques sont confessionnelles), ce que dénonce le mouvement « Fair Admission Campaign » qui a dressé la carte des établissements confessionnels anglais en intégrant des critères socio-économiques.
Le débat recoupe celui de la question de la ségrégation sociale car le niveau de réussite des établissements n'est pas le même selon les confessions.
Dessin de Zorro pour l'article Royaume-Uni : « Nous voulons un modèle similaire à la laïcité française », Charlie Hebdo, 6 janvier 2021