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Angela Merkel prêtant serment par le traditionnel "So war mir Gott helfe" (Que Dieu me vienne en aide), lors de son investiture du 17 décembre 2013, capture d'écran de l'émission d'Arte Karambolage.

Si l'Allemagne n'a pas de religion d'État officielle et garantit la neutralité de l'État vis-à-vis des religions, l'État allemand finance cependant les religions reconnues et établit un partenariat qui les institue comme « corporations de droit public ».

 

Chaque Allemand doit ainsi déclarer sa religion et payer un impôt au bénéfice de son Église, la Kirchensteuer (« taxe d’Église »), qui représente 8 à 9% de l’impôt sur le revenu. Comme les impôts sur le revenu, cet impôt est prélevé à la source par l’administration fiscale qui le reverse à l'église correspondante.

 

Les églises chrétiennes d'Allemagne et leurs services sociaux - Caritas pour les catholiques, la Diakonie pour les protestants - représentent le deuxième employeur derrière le secteur de la métallurgie et bénéficient  d’un « droit du travail ecclésiastique » qui leur est propre. Se remarier après avoir divorcé peut y être, par exemple, un motif de licenciement. Les employeurs catholiques ou protestants ne connaissent ni syndicats ni comités d’entreprise, et leurs salariés n’ont pas le droit de faire grève. 

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Une loi contre le sacrilège et le blasphème existe depuis 1861 et est toujours en vigueur aujourd’hui en Allemagne. Selon le Code pénal allemand : Section XI – Des délits relatifs à la religion Art. 166 – 1) « Toute personne qui, publiquement ou par diffusion d’écrits, insulte le contenu des convictions religieuses ou philosophiques d’autres personnes, et ce d’une manière apte à troubler la paix publique, sera punie d’emprisonnement jusqu’à trois ans ou d’une amende. »

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L’instruction religieuse, enfin, est une matière enseignée dans les écoles publiques et placée sous le contrôle de chacune des communautés religieuses. Se dispenser de suivre ces cours reste possible à condition, dans la plupart des Länder, de suivre des cours d’éthique ou de philosophie (mettant ainsi à pied d’égalité l’enseignement confessionnel avec des enseignements de portée universelle).

 

La première phrase du préambule de la Loi fondamentale de la République fédérale d'Allemagne du 24 mai 1949 (la Constitution allemande) place la responsabilité du peuple allemand « devant Dieu et devant les hommes ». Chaque chancelier élu, tout comme ses ministres, prête ainsi serment devant le Bundestag en prononçant solennellement la formule : « que Dieu me vienne en aide » (« So wahr mir Gott helfe »).

« Le fisc allemand à la poursuite des baptisés français »

 

Un Français vivant à Berlin et pourtant déclaré "athée" a eu la désagréable surprise de devoir payer une taxe de 550 euros, car il était baptisé.

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Les voies du fisc sont parfois impénétrables... À peine débarqué dans la capitale fédérale allemande en janvier 2013, Thomas Bores s'est inscrit auprès des bureaux municipaux (Bürgeramt) de son quartier de résidence, comme la loi l'y oblige. Afin d'obtenir sa déclaration de domicile, cet ingénieur a dû remplir un formulaire et préciser sa religion. Baptisé mais athée, il décide de cocher la case "sans confession".

Le bureau des impôts sur le culte de Berlin lui envoie peu après une lettre lui demandant s'il ne souhaite pas revenir sur sa déclaration. "Je confirme bien que je suis sûr et certain d'être athée, explique Thomas sur son blog. Je trouve ce formulaire très intrusif, mais je me dis qu'au moins, maintenant, ils vont me laisser en paix. Grave erreur." L'ingénieur en informatique découvre en effet au mois de janvier dernier sur sa feuille d'impôt un prélèvement inattendu de 550 euros. Un coup de téléphone à la comptable de son entreprise lui apprend que le fisc lui a ponctionné la taxe sur le culte que doivent verser tous les croyants en Allemagne. Commence alors, aux dires mêmes de l'intéressé, "une des plus grandes courses d'endurance de ma vie"...

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"Violation des données personnelles"

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La bureaucratie fédérale allemande est en effet encore plus complexe et pointilleuse que l'administration française... Le bureau des impôts de son arrondissement lui demande ainsi de s'adresser au bureau des impôts sur le culte de son quartier, qui le renvoie au bureau des impôts sur le culte de Berlin. La fonctionnaire lui explique alors qu'il doit payer cette taxe comme tout baptisé qui se respecte. Incrédule, Thomas Bores cherche à obtenir plus d'informations, mais, face à la fermeté de son interlocutrice, il choisit de contacter de nouveau le bureau des impôts de son arrondissement. L'employé lui conseille d'appeler l'administration centrale des impôts qui le dirige vers son... Bürgeramt.

Après avoir consulté son dossier, une salariée lui indique que son statut religieux a été modifié après que l'évêché de Berlin a précisé qu'il était bel et bien catholique. Un dernier coup de fil lui apprend que le diocèse de la ville française où il s'est fait baptiser a envoyé son certificat de baptême à l'Église catholique de Berlin, qui lui en avait fait la demande, et qu'il devait en conséquence payer l'impôt sur le culte. Alerté, le député des Français de l'étranger pour l'Allemagne, l'Europe centrale et orientale, Pierre-Yves Le Borgn, a critiqué dans une lettre envoyée au ministre des Affaires étrangères les pratiques de l'administration et de l'Église allemandes qui "violent [...] la directive européenne 95/46/EC sur la protection des données personnelles à des fins financières". Mais, pour échapper à l'impôt, Thomas Bores n'a, semble-t-il, qu'un seul et unique choix : se désinscrire des listes de baptême en France. Le parcours du combattant de ce jeune expatrié n'est pas terminé...

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Caritas, premier employeur privé d'Allemagne

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Si la liberté de culte est garantie dans la loi fondamentale de 1949, la République fédérale allemande est loin d'être aussi laïque que la France. De nombreux emplois sont ainsi interdits plus ou moins explicitement aux athées. Une grande partie des hôpitaux, des écoles maternelles et des maisons de retraite outre-Rhin sont gérés par des associations religieuses. La fondation catholique Caritas est le premier employeur privé du pays, avec près de 559 000 salariés. La protestante Diakonie Werke compte, elle, presque 450 000 employés.

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Pour décrocher un travail, "une personne qui déclare dans sa lettre de motivation être catholique ou protestante aura de meilleures chances qu'un candidat qui a quitté l'Église", expliquait au journal Die Zeit Werner Negwer, un responsable de Caritas. De nombreux Allemands acceptent en conséquence de se baptiser sur le tard, non pour des raisons religieuses mais pour trouver un emploi à durée indéterminée. En Allemagne, il est souvent plus facile d'être croyant qu'athée, même si cela augmente vos impôts...

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Article du 23 février 2015 publié par le journal Le Point - Économie

Par Frédéric Therin

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