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Pourquoi la laïcité L'esprit critique des Lumières
Laïcité : penser par soi-même, exemple de Candide
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La laïcité permet la liberté de pensée

Le principe de laïcité en France se fonde sur l'héritage philosophique du "libre examen", l'esprit critique, la pensée libérée de tout dogmatisme. C'est ce que l'école publique s'attache à transmettre.

 

L'héritage humaniste

Montaigne : l'esprit critique contre le dogmatisme

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Montaigne, écrivain et philosophe humaniste du XVIe siècle, a durablement marqué la pensée par ses Essais. Antoine Compagnon explique dans un article du Monde que Montaigne peut être considéré comme un "précurseur de la laïcité" car il est le père de l'esprit critique.

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Dans les Essais, Montaigne propose une démarche philosophique sceptique, "enquêteuse", contre toute forme de dogmatisme. Dans ce passage, il critique l'éducation qui apprend aux enfants à devenir des savants, c'est-à-dire à répéter ce qu'ils ont appris par coeur, et non à réfléchir et à penser par eux-mêmes. Pour apprendre, il convient d'abord d'accepter et d'avouer son ignorance :

 

"On me fait haïr les choses vraisemblables quand on me les plante pour infaillibles. J'aime ces mots, qui amollissent et modèrent la témérité de nos propositions : à l'aventure [peut-être], aucunement [dans une certaine mesure], quelque, on dit, je pense, et semblables. Et si j'eusse eu à dresser [éduquer] des enfants, je leur eusse tant mis en la bouche cette façon de répondre enquêteuse [qui cherche et questionne], non résolutive [affirmative, dogmatique] : “Qu'est-ce à dire ? Je ne l'entends pas. Il pourrait être. Est-il vrai ?” qu'ils eussent plutôt gardé la forme d'apprentis à soixante ans que de représenter les docteurs [savants] à dix ans, comme ils font."

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Montaigne, Essais, III, 11, "Des boiteux", 1588.

Pour aller plus loin : lecture du chapitre sur le site de l'université de Tours

Montaigne Philomix

Dessin tiré de l'album Philocomix, par Jean-Philippe Thivet, Jérôme Vermer et Anne-Laure Combeaud, aux éditions Rue de Sèvres, 2017

 

La devise des Lumières :
ose savoir !

Les penseurs des Lumières se sont attachés à libérer les hommes de l'emprise des superstitions et des dogmes, notamment religieux, après des siècles de guerres civites, dans un combat pour la tolérance et la paix. Le principe des Lumières, "penser par soi-même", qui désigne l'esprit critique, a été formulé et expliqué par le philosophe allemand Emmanuel Kant.

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KANT : Qu'est-ce que les Lumières ?

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Sapere aude, « Aie le courage de te servir de ton propre entendement »,

telle est la devise des Lumières.

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Dans ce célèbre opuscule publié en1784, Emmanuel Kant définit le principe des Lumières (Aufklärung en allemand) par la métaphore de la minorité :

 

"Les Lumières ont pour but la sortie de l'homme de sa minorité, dont il porte lui-même la responsabilité."

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Le but est l'émancipation des hommes qui doivent apprendre à penser par eux-mêmes, développer leur esprit critique sans se laisser guider par les dogmes religieux ou politiques. Il résume cette émancipation par la formule latine empruntée au poète latin Horace : sapere aude, qu'on traduit par "ose savoir" ou "ose connaître".

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Pour lire le début du texte de Kant

Une explication du texte sur le site iPhilo

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C'est ce principe qui est au fondement de la laïcité à l'école.

L'école publique, qui forme les futurs citoyens, doit aider les élèves à accéder à leur majorité c'est-à-dire à penser par eux-mêmes. L'école doit donc offrir à tous à la fois un enseignement et un espace neutres, afin de favoriser leur émancipation.

Candide et la laïcité, quel rapport ?

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Illustration de Candide ou l'optimisme par Quentin Blake

Le célèbre conte philosophique Candide ou l'optimisme, écrit par Voltaire en 1759, raconte le voyage initiatique d'un jeune homme naïf qui voit le monde, avant de le connaître, selon la philosophie optimiste enseignée par son professeur Pangloss qui dit que "tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles."

Le voyage autour du monde qui conduit le héros à découvrir toutes les injustices et les horreurs commises par les hommes (l'Inquisition, la guerre, l'esclavage, etc.) permet au personnage de s'émanciper. A la fin du récit, Candide renonce à l'optimisme qui est intenable. Il n'écoute plus son maître à penser : il a appris à penser par lui-même.
Le parcours de Candide reflète l'idéal d'émancipation des Lumières, qui est
au fondement de la laïcisation de l'école publique.

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Pour aller plus loin : le site de la BNF dédié au conte.

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Carte du voyage de Candide, sur le site de la Bibliothèque Nationale de France

L'Encyclopédie des Lumières

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Planche de l'Encyclopédie, tome V, "Papeterie, cuve à ouvrer", L'Histoire par l'image

En 1751 paraissent les deux premiers tomes de l'Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, dont Diderot définit ainsi l'enjeu :

 

"Le but d'une encyclopédie est de rassembler les connaissances éparses sur la surface de la terre ; d'en exposer le système général aux hommes avec qui nous vivons, et de le transmettre aux hommes qui viendront après nous ; afin que les travaux des siècles passés n'aient pas été inutiles pour les siècles qui succèderont ; que nos neveux devenant plus instruits, deviennent en même temps plus vertueux et plus heureux ; et que nous ne mourions pas sans avoir bien mérité du genre humain."

À travers leur œuvre, les encyclopédistes transmettent leur idéal philosophique :


- diffuser auprès du plus grand nombre un savoir libre de tout préjugé, de toute superstition
- mesurer les connaissances à l’aune de la raison
- fournir un matériel pour, comme Diderot le proclame dans l’article « Encyclopédie » :
"changer la façon commune de penser."

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"Ce qui caractérise le philosophe et le distingue du vulgaire, c’est qu’il n’admet rien sans preuve, qu’il n’acquiesce point à des notions trompeuses et qu’il pose exatement les limites du certain, du probable et du douteux. Cet ouvrage produira sûrement avec le temps une révolution dans les esprits, et j’espère que les tyrans, les oppresseurs, les fanatiques et les intolérants n’y gagneront pas. Nous aurons servi l’humanité."
Lettre de Diderot à Sophie Volland, 26 septembre 1762.

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Les connaissances sont la condition de l'esprit critique qui seul permet de lutter contre l'intolérance et le fanatisme.

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Source : site de la BNF à explorer pour aller plus loin

 

Le frontispice de l'Encyclopédie

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Le dessin original de Charles-Nicolas Cochin (1715-1790) a été exposé au Salon de 1765 et commenté par Diderot lui-même.

La gravure fait apparaître, dans une sorte de compilation sur différents plans imbriqués, des allégories : les Arts, les Sciences et les facultés humaines (Mémoire, Imagination, Raison), la quête de la Vérité et enfin l’Instruction.

Ce dessin représente une vision synthétique et philosophique du monde. Plusieurs fois copiée, cette estampe parut dans différentes éditions de l’Encyclopédie.

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"La Raison et la Philosophie dévoilent la Vérité au pied de laquelle est agenouillée la Théologie. Tout autour, se trouvent les disciplines relevant de la mémoire, de l’Imagination et de la Raison."

La raison, c'est-à-dire l'esprit critique, se fonde sur les connaissances. C'est le principe de l'enseignement de l'école publique laïque.

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Source : site de la BNF

 

Commentaire du frontispice dans l'Encyclopédie en 1772.

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Détail du frontispice de l’Encyclopédie, gravure à l'eau-forte et au burin de Bonaventure-Louis Prévost, graveur et Charles-Nicolas Cochin, dessinateur, 1772.

Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de la Photographie.

L'enseignement du français à l'école

 

"Pratiquer l’analyse littéraire en classe aujourd’hui (...) c'est revendiquer avec conviction la valeur intrinsèquement humaniste de notre discipline : développer chez les enfants et chez les adolescents des capacités d’analyse et de synthèse, une aptitude à mettre en relation les éléments observés pour leur donner du sens dans une véritable démarche d’investigation et d’interprétation, les accompagner dans la construction d’une réflexion personnelle nuancée et étayée, c’est contribuer à faire d’eux des adultes libres parce qu’éclairés, c’est leur donner des clés pour lire et penser le monde."

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Extrait du rapport de jury du CAPES de Lettres Modernes, 2017, p122.

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