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Vers l'exception de l'Alsace-Moselle

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Signature du Concordat du 15 juillet 1801 entre les représentants du pape Pie VII et de Bonaparte.

Gravure coloriée du XIXe siècle, Musée Carnavalet.

 

Le Concordat marque un retour de l'alliance politique de la France avec l’Église
 

Contexte : le règlement de la question religieuse après la Révolution


Au lendemain du coup d’État du 18 Brumaire, Bonaparte, Premier consul, sait que pour se maintenir, il doit régler la crise religieuse qui agite la France depuis dix ans. L’alliance avec l’Église catholique est nécessaire : pour dissocier la cause de la monarchie de celle d’une religion à laquelle les Français restent généralement attachés ; pour réguler, par ses ministres et son enseignement, l’ordre moral et social ; pour assumer les tâches d’éducation et d’assistance que l’État ne peut prendre en charge.

De son côté, Pie VII, élu en mars 1800, veut restaurer l’unité de l’Église, gravement menacée par la situation en France, première puissance catholique du temps. En 1789, elle y avait perdu tous ses biens. En 1790, la constitution civile du clergé, votée par l’Assemblée constituante, avait provoqué un schisme intolérable : celui d’une église nationale (l’Église constitutionnelle) dont tous les ministres, même les évêques, étaient élus par les fidèles sans que Rome ait son mot à dire. La laïcité de l’État, instituée en 1794, et l’interdiction de toute manifestation extérieure du culte avaient confiné le catholicisme dans la sphère privée. Abolir le schisme en France, y rendre à l’Église ses moyens d’action, telles sont ses priorités.

Source :
Nadine Gastaldi, Conservateur au Centre historique des Archives nationales, novembre 2004, L'Histoire par l'image

En 1801, Napoléon signe avec le Pape Pie VII le Concordat pour organiser le culte en France.

La religion catholique y est définie comme « la religion de la grande majorité des français ». Les cultes protestant et juif sont tolérés, mais sont régis par des textes à part.

Le Concordat implique un financement de l’Église par l’État (salaires des ministres, financement des lieux de culte), ainsi qu'un enseignement religieux à l'école.

 

On peut le considérer comme une forme de mise sous tutelle de la religion catholique, qui permet à l’État de nommer les évêques, les ministres des cultes et de les rémunérer. La religion catholique devient une forme de service public.

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Reliure de la Convention du 26 Messidor An IX

L'exception de l'Alsace-Moselle à la loi de 1905

Abrogé en 1905 par la loi de séparation des Églises et de l’État, le Concordat subsiste cependant en Alsace et en Moselle qui étaient en 1905 sous domination allemande.

L'Alsace-Moselle a en effet vu ses territoires annexés par l’Allemagne en 1870. De retour en France en 1918 après la Première guerre mondiale (puis de nouveau annexée et rendue à la France en 1945), l’Alsace et la Moselle ont conservé le régime concordataire en vigueur avant 1905, tout comme le droit local allemand hérité de la période d'occupation de 1871 à 1918.
 
Si le Concordat inclut les deux cultes protestants (luthérien et calviniste) et le culte israélite, religions déjà reconnues à l'origine bien que régies par des textes séparés, il ne concerne pas l’islam qui n'était pas représenté en France métropolitaine sous Napoléon, au moment de la signature du Concordat.

En contradiction avec les principes de 1905, le Concordat autorise la rémunération des ministres des cultes (prêtres, évêques, pasteurs et rabbins) et le financement des lieux de culte par l’État. Le droit local allemand permet quant à lui l’enseignement religieux à l’école publique ainsi que des cursus de théologie protestante et catholique dans les universités de Metz et Strasbourg.

 

Le maintien du Concordat en Alsace-Moselle est régulièrement l'objet de débats politiques en France.

Le régime concordataire encore en vigueur aujourd'hui en Alsace-Moselle est controversé puisque la France est laïque par sa constitution et que la République est définie comme indivisible.

Outre la question du financement des cultes par l’État, les débats portent sur l'enseignement religieux dispensé dans les écoles publiques.

Si le délit de blasphème a été abrogé en 2018, l'enseignement religieux, autre héritage du droit local allemand, est « obligatoire mais soumis à dispense » : les élèves peuvent en être dispensés à la demande des parents, mais il s'effectue pendant les horaires obligatoires, du cours préparatoire à la terminale.

Il ne concerne en outre que les quatre cultes « reconnus » par le Concordat (catholique, israélite, protestant luthérien et protestant réformé) et les chargés de cours de religion sont rémunérés par l'État.

En 2021, un sondage indiquait que 78% des Français et 52% des Alsaciens-Mosellans sont favorables à l'abrogation du Concordat en Alsace-Moselle.

Le Concordat aujourd'hui

La religion musulmane n'étant pas mentionnée dans le Concordat, une délibération du conseil municipal strasbourgeois a décidé en 1999, dans un souci d'équité, d’appliquer la règle à l'ensemble des cultes : les musulmans peuvent s’organiser sous la forme d’associations de droit local alsacien-mosellan (la loi de 1901 sur les associations ne s'appliquant pas plus que la loi de 1905) et recevoir des subventions, puisque le financement des cultes reconnus est autorisé par le Concordat.

En 2013, le Conseil constitutionnel a entériné la validité du Concordat, le considérant comme une tradition républicaine observée par tous les gouvernements depuis 1919, la Constitution de la Ve République ne l'ayant pas remis en question.

L'éventail des positions politiques sur la question lors de la campagne présidentielle en 2012 :

   Extrait du Journal Télévisé, Alsace soir, FR3

  

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Débat sur le statut de l'Alsace-Moselle à l'Assemblée nationale le 12 juillet 2018 :

 

Polémique sur le financement de la construction d'une mosquée à Strasbourg

En mars 2021, la majorité municipale écologiste de Strasbourg a voté le principe d’une subvention de l’État de 2.5M€ pour la construction d’une mosquée.

Exemples des débats qui ont suivi ce vote :

- Le 29 mars 2021, l'universitaire Gérard Bouchet publie une tribune dans le journal Marianne : "Mosquée de Strasbourg : le piège du Concordat".

L'auteur souligne la stratégie d'entrisme politique du président turc qui cherche, par ce projet, à "montrer aux yeux du monde la volonté et la capacité conquérante de l'islam politique" ainsi que l'influence des Frères Musulmans sur les associations défendant le projet, qui ont refusé de signer la charte proposée par le Conseil Français du Culte Musulman.

*Gérard Bouchet est l'auteur de Laïcité - séparation ou régression néo-concordataire ? collection Débats laïques, L’Harmattan, novembre 2020, et de La Laïcité en question(s), même collection, 2018.

- Le 6 avril 2021, Le Monde présente dans un article la controverse autour du financement de la mosquée, le préfet du Bas-Rhin ayant saisi le tribunal administratif du conseil municipal en contestant la légalité du vote. Le ministre de l'intérieur, Gérald Darmanin a "reproché à la maire écologiste de Strasbourg de financer une « ingérence étrangère », en l'occurrence cette de la Turquie, sur le sol français."

- La chaîne Public Sénat publie le 10 avril 2021 l'article d'un sénateur favorable à la suppression du régime concordataire en Alsace-Moselle, la polémique sur le financement public de la mosquée à Strasbourg ayant relancé le débat : "Concordat en Alsace-Moselle : faut-il le supprimer ?"

- Dans un article du 16 avril 2021, Le Figaro annonce le retrait du projet.

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